Jacques Fournier
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Jacques FOURNIER
Né en 1959.
Directeur de la Maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines depuis février 2002.
Instituteur de 1983 à 2002.
Fondateur (en 1994) et coresponsable (avec Dan Bouchery) des éditions l’épi de seigle.
A fondé et dirigé les revues mezzanine (1995-1998) et décol’ (1993-2006).
Cofondateur et coresponsable (avec Dan Bouchery) de la feuille à publication aléatoire Plus con tu meurs (2008), créée en hommage à Jean L’Anselme.
Cofondateur (avec Dan Bouchery) de l’association La CONfrérie Jean L’Anselme (2009).
Directeur de la rédaction de la revue semestrielle Ici & Là - Maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines- (depuis 2004).
Président de la Fédération européenne des Maisons de poésie / Réseau international / MAIPO
Membre du MUP (Ministère universel des poésiens).
Publications :
Marche le monde, suivi de Petite suite pour un grand méchant loup, éd. Corps Puce, Amiens, 2007
Le Gant, ill. V. Rougier, éd. V. Rougier – Ficelle, Soligny-le-Trappe, 2006
Poèmes pris au vol, ill. Catherine Comeyras, éd. Pluie d’Etoiles, Toulon, juillet 2001
Les Dits de la Pierre et du Sculpteur, éd. Traces, Nantes, 1992 ; éd. l’épi de seigle, rééd. 2000
Arbrures, éd. l'épi de seigle, 1994, rééd. 1996 et 2000, sélectionné par le Ministère de l’Education nationale, imprimé en braille et enregistré sur CD par le CRDP Nord-Pas-de-Calais, 2002
En anthologies (sélection) :
Lumière/Lumière(s), éd. Donner à Voir, Le Mans, 1996
Les Fins de Mois sont Poétiques, éd. Bibliothèque Municipale, Mouans-Sartoux, 1997
Mille Poètes, Mille Poèmes Brefs, éd. L'Arbre à Paroles, Amay, Belgique, 1998
Le Promenoir Vert, CD Rom de poésie contemporaine, CRDP Poitou-Charentes, 1999
Enfance, Enfance(s), éd. Donner à Voir, Le Mans, 2003
Carré comme une roue de vélo, une anthologie cycliste et poétique, éd. l’épi de seigle, 2006
Poésies d’expression française, éd. Seghers, Paris, 2008
Calendrier de la poésie francophone, éd. Alhambra, Bruxelles, 2008
Les Riverains du feu, anthologie de poésie émotoviste, Christophe Dauphin, éd. Le Nouvel Athanor, 2009
A réalisé et coréalisé les anthologies poétiques :
De l'arbre, 1991, épuisé
Le Chemin des Étoiles, éd. Musique et Culture 68, Colmar, 1993, épuisé
Drôles de Poèmes et Poèmes Drôles / Gedichte zum Lachen voll komischer Sachen, en collaboration avec Rüdiger Fischer, 1995
Poèmes pour s'éclairer à la Luciole, 14 poètes de la Charte,l'épi de seigle, 1998, réédité en 2002, imprimé en braille et enregistré sur CD par le CRDP Nord-Pas-de-Calais, 2002
Vivre quand même parce que c’est comme ça, choix de poèmes de Roland Nadaus, éd. L’Idée Bleue, Chaillé-sous-les-Ormeaux, 2004
Naissance/s/, une anthologie poétique franco-africaine, éd. l’épi de seigle, Beaumont-en-Auge, 2006 (avec Dan Bouchery)
Carré comme une roue de vélo, une anthologie cycliste et poétique, éd. l’épi de seigle, Beaumont-en-Auge, 2006 (avec Dan Bouchery)
A publié textes poétiques et articles dans les revues Fond(s) de Tiroir, Cahiers Froissart, Traces, Poésia (Bucarest), Parterre Verbal, Matrix (Allemagne), Revue Alsacienne de Littérature, Gros Textes, Décharge,...
A publié dossiers, articles, poèmes, contes et fiches pédagogiques dans la revue pédagogique Education Enfantine (éd. Nathan).
A publié des articles dans les revues :
Inter BCD, éd. Cédis
Parterre Verbal : n° spécial l'Enfant et la Poésie
Le Journal des Instituteurs, éd. Nathan
Conférences (sélection) :
Le paysage dans la Poésie Jeunesse contemporaine, Institut International Charles Perrault-Eaubonne (Val d’Oise), mars 1999
L’Atelier d’Ecriture Poétique, Association d’Art Thérapie Puzzle Tourcoing (Nord), juin 1999
L’édition poétique jeunesse en 1999 : un état des lieux, Institut International Charles Perrault-Eaubonne (Val d’Oise), février 2000
Un panorama de la poésie jeunesse, Salon du Livre de Sallanches, Haute Savoie, novembre 2000
Intervient régulièrement auprès des publics jeunesse et adultes pour des temps de découverte de poésie d’aujourd’hui (lecture,écriture).
« Homme de terrain très actif et fraternel, il st un poète dont les publications sont rares et attachantes. L’écriture est concise, le poème est épuré au possible, les mots sont ciselés. Pour Jacques Fournier, la poésie fait vivre et fait croire en la vie et en tout ce qui la constitue. »
Christophe Dauphin, Les Riverains du feu
Il y a chez Jacques Fournier une vraie tendresse qui ne s’en laisse pas compter et joue avec un bel humour. Cette poésie-là n’a pas besoin de glose. Elle dit ce qu’elle dit… et bien plus mais ce « bien plus » ou ce bien en plus ne se « décode » pas : il se rêve.
Poèmes de Jacques Fournier
Cris et rires d’enfants
Par la fenêtre ouverte
De l’autre côté
C’est dire si loin
Aboiements rauques
Ronflements de moteur de voitures
Voix d’adultes presque des cris
Crissements de caoutchouc sur le gravier
Peurs de chutes blessures avertissements
Câlins de voix appels répétés de prénoms
Echos sur les murs de l’air
Et tes mains qui caressent mon sexe
C’est dire si loin de nous
***
Je n’ai pas sommeil
Je n’ai pas sommeil. Cette fois-ci, je n’ai pas sommeil.
Je resterai éveillé tout le trajet.
Je regarderai tout le paysage défiler à grande vitesse, sans en perdre une seule miette.
Je sentirai dans mon corps passer l’heure entière, sans en perdre une seule seconde.
Je n’ai pas sommeil. Cette fois-ci, je ne dormirai pas.
D’ordinaire, le roulis me fait somnoler au bout de quelques minutes à peine. Non pas que je dorme mal la nuit et que ce voyage hebdomadaire soit l’occasion d’une telle détente générale des muscles et de l’attention que tout mon corps se laisse aller à la jouissance sans limite - sauf celle de l’arrivée - du sommeil. Non : je dors bien, nuitamment, toutes les heures dont mon corps a bien besoin. Et mes journées de travail ne sont pas suffisamment fatigantes pour justifier une entrée systématique et hebdomadaire dans ce sommeil ferroviaire. Mais c’est ainsi : habituellement, je dors dans le train.
Mais cette fois-ci, non, je ne dormirai pas.
Je l’ai senti tout de suite, dès les premiers tours de roues. Le sommeil ne voulait pas de moi. Et comme je ne le cherchais pas non plus, je ne l’ai pas trouvé.
Alors, je resterai éveillé tout le trajet sans chercher à expliquer la raison de cette absence de somnolence. Il y a là une logique contre laquelle je ne peux rien. Mes yeux n’ont même pas cligné, ma tête ne s’est pas un seul instant sentie plus lourde. Je n’ai pas dormi.
Alors que toutes les autres fois, je dors.
Et d’un sommeil profond.
Souvent, et je pourrais dire presque toujours, à peine assis à ma place - et il est rare que j’arrive au dernier moment, ayant en horreur la précipitation - je parviens à prendre mon temps pour une installation détendue, loin de l’urgence dans laquelle s’agitent bon nombre de voyageurs qui arrivent - quand ils arrivent ! - essoufflés, transpirants, échevelés, les bras gourds d’avoir porté des sacs trop lourds, mal équilibrés. Et qui, frénétiquement, s’installent, déplient bruyamment la tablette, y déposent avec démonstration sac, sandwich et bouteille ou canette de soda, dans un ahurissant froissement de papier ou de plastique, ou bien ouvrent non moins bruyamment un journal, qu’ils ne lisent pas tout de suite. Ils ont comme un besoin de délimiter un territoire, leur territoire, comme un renard fait en urinant. Et quand le train s’ébroue, ils peuvent enfin s’adonner à quelque activité que ce soit et qui toutes semblent essentielles, voire vitales à ce moment précis : manger, lire, téléphoner (ah téléphoner !). Ou dormir.
Quant à moi, habituellement, je n’ai nul besoin de cette agitation pour trouver le sommeil. Il vient seul.
Un sommeil si profond que je ne m’éveille, en général, qu’une fois en vue de la gare d’arrivée, quand le train ralentit.
Un sommeil profond mais trop court. Toujours trop court. Je le sens bien au réveil. Je reste comme engourdi quelques minutes après.
En tout cas, je me réveille toujours avant l’arrêt définitif : c’est la voix du chef de train annonçant l’imminence de cette arrivée qui doit être à l’origine de presque tous mes réveils.
A moins que ce ne soit ce ralentissement nécessaire à l’approche de la gare.
Et si ce réveil arrive tard, quand le train est déjà entré en gare, je ressens cet engourdissement jusqu’à la descente, et même au-delà. Sur le quai, je me sens comme bousculé - même si je ne le suis pas vraiment, physiquement, je veux dire - par les autres voyageurs, qui semblent bien mieux réveillés que moi. Mais, quand je prends le temps, tout en marchant lentement, plus lentement que la moyenne, de regarder autour de moi sur le quai, je vois bien aux mines défaites, aux cheveux en bataille, aux costumes froissés, aux yeux rougis, que je ne suis pas le seul à subir cet engourdissement.
Terrible accident ferrovaire près de Lille, Nord - vendredi 25 mai, 18 h.45 GMT.
Lille- Le TGV Paris-Lille a déraillé et percuté à plus de 240 kilomètres par heure une rame qui venait en sens inverse, à la même vitesse. Les secours arrivés sur place ont déjà retirés 97 corps sans vie, et plus de 260 blessés dont une trentaine dans un état grave ou très grave. C’est un bilan provisoire qui s’alourdit de minute en minute. Le Ministre des Transports qui s’est rendu immédiatement sur les lieux du drame a demandé une enquête.
Je n’ai pas dormi. Bien m’en pris : j’avais toute ma conscience quand le choc s’est produit.
J’ai vu la mort venir, comme si je l’attendais alors que rien, rien vous dis-je, ne me disposait à l’attente.
***
Sur les quais
Sur les quais, des sacs oubliés, il y en a. Et nous ne savons ni par qui ni pour qui. Mais ils sont là. Attendant la main qui les emportera, l’œil qui les scrutera, le geste qui les videra. Mais ils sont là. Posés. Patients. De la patience des pierres sur le bord du chemin qui n’espèrent plus le bout de la chaussure qui les poussera plus loin. Ils sont là, les sacs sur les quais. Et nous n’osons nous en approcher.
***
Sur les quais encore, devenues rares, les larmes qui roulent.
***
Sur les quais, la solitude. Palpable. Immobile mais faisant les cent pas dans l’attente du départ, toujours du départ. La solitude avant l’heure, non plus fœtus informe, mais formée comme corps d’adulte dans corps d’adulte, donnant des gestes d’épuisement, de renoncement, combattue pourtant.
***
Sur les quais les frôlements, plus rarement les frottements. Sauf les corps amoureux, en rupture, en absence à venir. En devenir de vide.
***
ça y est il a plu
ça y est il a plu
des gouttes grosses comme
des gouttes
sont venues s’écraser sur le carreau
et roulent et se déroulent maintenant sur la transparence du verre
qui en devient presque opaque
et finissent sur le rebord de la fenêtre
amas informe d’eau
petite flaque pour fourmi naine
ça y est il a plu
et moi qui attendais la pluie
pour écrire quelque chose sur elle
je n’ai rien vu rien entendu
je dormais
***
Autres poèmes
Tambour sur les tuiles
Chamailleries d’enfants.
A quand l’éclaircie ?
***
L’oiseau se mire
Dans la flaque de pluie
Reflet imparfait.
***
Goutte à goutte
De la gouttière percée.
Métronome de mars.
***
Les arbres ont pris
Quelques kilos de pluie.
Au soleil ils feront
Une cure d’amaigrissement.
***
Le grenouille se croit
A l’abri de la pluie
Sous sa feuille de nénuphar.
***
Tu ouvres les yeux
C’est le noir
Tu n’entends que
Ton souffle
Court
Tu voudrais tant
La lumière
Mais tu n’oses pas
Te lever
Alors tu refermes
Les yeux
Et te réveilles
Dans la douce lueur du matin.
***
Quand le vent en eut assez
de soulever
les feuilles des arbres
quelques papiers gras
et les jupes de filles
Quand le vent en eut assez
il souleva la Terre
Et la Terre se mit à tourner
à tourner, à tourner
sans jamais s’arrêter.
***
Le vent a été contrôlé à plus de deux cents kilomètres heure.
« Vos papiers » lui demande le gendarme courroucé.
Et le vent fit virevolter
un emballage de goûter
un mouchoir usagé
une note d’huissier
une publicité déchirée
une lettre d’amour effacée
une facture impayée
et tant et tant d’autres papiers
que le gendarme en laissa s’échapper
son carnet à PV.